Aussi noble et ancienne soit-elle, l'organisation de la
justice n'a pas été épargnée par la mondialisation. Au contraire, elle a
discrètement accompagné ce phénomène d'ouverture et d'intégration
internationale que la mondialisation a impliqué. Trois dates illustrent
particulièrement cette évolution : 1948, où le principe interdisant l'accès des
étrangers aux tribunaux français a été abandonné par la Cour de cassation ;
1958, où la France a signé la Convention de New York sur l'arbitrage commercial
international ; enfin 1968, date de la signature de la Convention de Bruxelles
qui allait poser les jalons de l'Espace judiciaire européen, chacune augurant
d'un renouveau du traitement du contentieux international.
Jusqu'à aujourd'hui, jurisprudence et doctrine ont assez peu
tiré les conséquences de ce mouvement du droit de la compétence internationale,
limitant la matière et le jeu des règles à un cadre étatique qu'elle n'a plus
qu'occasionnellement. L'objet de cette thèse est donc de démontrer que cette
évolution, qui s'est poursuivie et approfondie, a permis la formation d'une
véritable organisation internationale entre des institutions - juridictions
françaises, étrangères, arbitrales et internationales - que l'identité de
fonction place en situation de concurrence.
Reconnaître cette organisation est d'ailleurs une double
nécessité. Pratique, d'abord, parce qu'elle permettrait, si l'on en tirait les
conséquences, de traiter enfin les questions de compétence de manière plus
souple et plus rapide (forum non conveniens civiliste, action en
déclaration d'incompétence, autorité internationale de la décision
d'incompétence entre autres). Politique, ensuite, car on ne saurait réfléchir
sur l'avenir de la justice et du droit français lui-même sans prendre en compte
les développements qui ont affecté le droit positif depuis plus d'un
demi-siècle.
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François MAILHÉ est maître de conférences de
l'Université Paris II - Panthéon-Assas.